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Le chantier de démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis devait être un modèle du genre. Son démarrage avait donné lieu à moultes visites guidées.

En fait de modèle, c’est un extraordinaire et dangereux bricolage qu’ont découvert les agents de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) : fûts corrodés, déchets nucléaires mal enregistrés, locaux sensibles ouverts au tout-venant, taux de radioactivité sous-estimés...

Retour sur la vie, pleine de rebondissements, de cette centrale.

première mise en ligne, 13 avril 2011

 

Brennilis : une toute petite centrale qui a très peu servi.

 

On garde de la Bretagne le souvenir de Plogoff et on oublie parfois que l’une des premières centrales nucléaires françaises a été implantée dans le Finistère : à Brennilis, au coeur des Monts d’Arrée.

 

 

"L’intérêt" de cette petite centrale de 70 MW, gérée par EDF et le CEA, était moins de produire de l’électricité que de fournir le plutonium nécessaire à la future force de frappe. Ce prototype expérimental eau lourde-gaz n’a jamais eu d’équivalent. Il s’est arrêté en juillet 1985 après vingt ans de fonctionnement.


L’Ankou. Une bande dessinée célèbre de Fournier avait pour décor Brennilis.


Le mythe du nucléaire qui apporte le progrès économique avait été largement développé à Brennilis... Il se disait même que l’eau courante était arrivée au village en même temps que la centrale. De fait le lotissement EDF et les taxes professionnelles faisaient des envieux dans les communes environnantes.

Mais la centrale n’était pas faite pour durer, après 20ans de fonctionnement elle s’arrêtait.

 

les emplois nucléaires ne sont pas "durables".

 

Une reconversion économique ratée.

L’arrêt du site et la reconversion économique étaient donc attendus comme une heure de vérité.

Le maire élu en 1989, Olivier Herry, un ancien du Commissariat à l’Energie Atomique (CEA), était particulièrement bien placé pour négocier cet "après nucléaire". Des projets, il n’en manquait pas qui le faisaient "rêver la nuit" : dans l’agro-alimentaire, dans le tourisme...

En 1990, avec Jean-François Coatamlem, ingénieur agronome et écologiste, il avait même monté le dossier d’un "Centre d’étude et de formation pour la protection de l’environnement". Une façon de tourner définitivement la page du nucléaire.

Certains n’étaient pas loin de croire au gag : ce qui était proposé c’était d’installer dans les bâtiments annexes de la centrale un centre chargé de "mettre au point dans les zones agricoles, de nouvelles formes d’exploitation et de gestion de l’espace naturel". Un centre et une politique qui auraient certainement évité à la Bretagne d’être montrée du doigt et sanctionnée comme elle l’est actuellement.

 

 

Ce projet comme beaucoup d’autres restait sans lendemain et cinq ans plus tard, Olivier Herry jetait l’éponge. En démissionnant de son poste de maire il n’hésitait pas à accuser : sur les 13,5 millions d’aides attribuées par EDF et le CEA, un million seulement était arrivé jusqu’à Brennilis, le reste s’était "évaporé" !

Les quelques PME qui occupent aujourd’hui les lieux sont loin de remplacer l’activité ancienne.

Une première étape de démantèlement déjà controversée.

 

Fin Décembre 1994, dix ans après son arrêt, la première étape du démantèlement de la centrale était soumise à enquête publique. L’opération proposée était un démantèlement de niveau 2.

Le niveau 1 avait déjà été réalisé, à partir de 1985, sans déclaration préalable.

Toute la partie "non-nucléaire" avait été démontée ou découpée et mise en conteneurs : turbo-alternateur, circuits de vapeur, installation de traitement de l’eau, machines de chargement contaminées...

Le combustible (100 tonnes) avait été expédié à Cadarache et stocké en silo béton en attendant une solution de traitement ou de stockage.

Le modérateurs, l’eau lourde (100 tonnes) avait d’abord été épurée à Grenoble d’où elle est revenue à Brennilis pour être réexpédiée à Cadarache et stockée à son tour.

Le niveau 2 soumis à enquête prévoyait le démontage de tout ce qui se trouvait à l’extérieur de l’enceinte ainsi que quelques circuits restés à l’intérieur. Des travaux cependant classés "à risque" qui le seraient d’autant plus que ceux ci étaient confiés à une entreprise privée.

Ensuite il était prévu de laisser reposer le coeur de la centrale pendant 50 ans.

C’est cette durée proposée par EDF et le CEA qui faisait réagir les élus locaux. Nous voulons un "retour à l’herbe" immédiat déclarait Jean-Yves Cozan, conseiller général de canton et député, pourtant partisan déclaré du nucléaire.

Un chantier que l’étranger devait nous envier

 

L’accélération du chantier était également ce que demandait André-Claude Lacoste, le patron de la DSIN (Direction de la Sûreté des Installations Nucléaires), le "gendarme du nucléaire" de l’époque. Il préconisait de "tout raser et de rendre le site à son état naturel".

L’objectif étant en réalité de faire un test "grandeur nature" et de réaliser, dans un site isolé, la première "déconstruction complète" de cette petite centrale en attendant de s’attaquer aux mastodontes à venir.

Michel Noraz, responsable du site et qui devait prendre sa retraite à la fin de l’année, voyait dans cette opération qui se devait "exemplaire" et à laquelle "les antinucléaires devraient rendre grâce", un moyen de "permettre aux entreprises intervenantes d’exporter leur expérience à l’étranger". "Ceux-ci nous envient" ajoutait-il dans une déclaration à la Presse de la Manche. Les marchés des centrales soviétiques, en particulier, semblaient prometteurs après l’accident de Tchernobyl.

 

 

La commission d’enquête proposait finalement d’étudier la faisabilité d’un démantèlement complet sous 20 ans et aussi de mettre en place un "observatoire" réunissant EDF, le CEA, les élus concernés, les administrations compétentes et les associations intéressées. EDF s’engageant à " la transparence, la clarté et la concertation".

 

Des visites bien organisées

Après l’avis favorable donné à un démantèlement de niveau 2, le site devenait pendant quelque temps un lieu de tourisme recherché. Dans des visites guidées (combinaison et casque obligatoires) on vous faisait constater la rigueur du travail : les sécurités étaient doublées, les espaces de travail bien séparés, pas un déchet sans son "code-barre" et son suivi informatique. Traçabilité assurée ! Ce chantier serait un modèle du genre !

 

Les partisans du "retour à l’herbe" se réveillent

Le chantier suivait donc son cours mais les partisans de l’accélération et du "retour à l’herbe" ne restaient pas inactifs.

En Janvier 2000, Jean-Yves Cozan député et président du "Parc d’Armorique" relançait une campagne en direction de la ministre de l’environnement, Dominique Voynet, qui connaissait bien le site pour l’avoir plusieurs fois visité, comme militante antinucléaire puis comme ministre.

Dans une lettre adressée le 12 janvier 2000 à toutes les mairies du Parc d’Armorique il définissait les objectifs de la campagne :


Objet : centrale de Brennilis "Retour à l’herbe ! "

Madame, Monsieur,

Veuillez trouver ci-joint une affichette (et prochainement une affiche) concernant le démantèlement de la Centrale nucléaire de Brennilis.

C’est le premier cas "de déconstruction", y compris du réacteur, en France et dans le monde (une première). Les études EDF et CEA ont conclu au scénario possible du démantèlement dans 18 ans, rejoignant ainsi l’objectif du Parc Naturel : le "Retour à l’herbe ! ".

Un site de stockage des déchets d’installations nucléaires est par contre à définir rapidement. Cette décision relève de la responsabilité de l’Etat et des parlementaires français qui doivent statuer au plus tard en 2005 (Loi Bataille).

A l’heure où de nombreuses centrales sont à l’arrêt dans le monde (plus de 100), cette préoccupation est non seulement la nôtre, mais celle de tous.

 

"Retour à l’herbe !
EDF et CEA ont dit Oui,
Que décide le Ministère de l’Environnement, Mme VOYNET ?
Que décide la France ? "

 


Sous l’herbe un centre d’enfouissement ?

Les antinucléaires connaissant bien leur Cozan, ne pouvaient manquer de remarquer cet appel au démantèlement rapide masquant mal la demande d’un centre d’enfouissement.

Pourquoi Brennilis ne se "dévouerait-il pas" devait penser le président du Parc d’Armorique ?

Cette crainte devait être confirmée par l’annonce faite en février de l’arrivée de la "mission Granit".

On se souvient que la loi Bataille avait prévu l’existence de deux "laboratoires" d’étude, dans des sites de nature différente, au minimum . Après l’argile de Bure restait à tester le granit.

C’est ce que décidait le ministère Jospin en nommant trois "mousquetaires" chargés "d’informer" les populations : Pierre Boisson (ingénieurs général des mines), Philippe Huet (inspecteur général du Génie rural, des eaux et forêts), Jean Mingasson (préfet de région honoraire et conseiller d’Etat). Leur mission était de parcourir les 15 sites granitiques pressentis dont 7 dans l’Ouest. Le granit de Huelgoat proche de Brennilis était effectivement dans la liste ainsi que quatre sites en Côtes d’Armor.

La mission "Granit" attendue de pieds ferme

L’annonce faisait l’effet d’une bombe dans le Finistère et dans l’Ouest en général. Une première réunion organisée dans la précipitation à Huelgoat remplissait une salle et une première manifestation était décidée pour le 20 mars.

Les manifestants seraient-ils au rendez-vous ? Le souvenir de Plogoff était-il encore vivant ? telles étaient les questions que se posaient les organisateurs.

 

 

Pari réussi, il étaient 5000, toutes générations réunies, pour un "Tro Menez Arre" antinucléaire autour du lac de Brennilis et bientôt 8000 à Quintin dans les Côtes d’Armor.

 

 

En Mayenne la mission vivait un baptême du feu mouvementé : les "mousquetaires" étaient empêchés de se rendre à leur première réunion et reconduits sous bonne escorte vers la sortie.

 

 

Les élus suivaient bientôt leurs troupes et, droite et gauche confondues, se prononçaient contre tout centre d’enfouissement. Finalement le gouvernement Jospin craignant les élections municipales à venir rappelait ses mousquetaires et "suspendait" la mission Granit.

 

 

A Brennilis, comme dans tout l’Ouest, la mobilisation retombait et avec elle, d’une certaine façon, la vigilance vis à vis du programme de démantèlement. C’est peut-être pourquoi EDF pensait pouvoir passer, en force mais discrètement, au niveau 3 de démantèlement complet.

Le 9 février 2006 était signé le "décret n° 2006-147 autorisant Electricité de France à procéder aux opérations de mise à l’arrêt définitif et de démantèlement complet de l’installation nucléaire de base n° 162 dénommée EL 4-D, installation d’entreposage de matériels de la centrale nucléaire des monts d’Arrée."

Quand le Réseau "Sortir du Nucléaire" s’en mêle

C’était sans compter sur la vigilance des militants locaux du "réseau Sortir du nucléaire". Constatant l’illégalité du procédé, ceux-ci déposaient une requête au Conseil d’Etat demandant l’annulation de cette décision.

Le 6 juin 2007 le Conseil d’état leur donnait raison et le décret était annulé. Faisant intervenir un huissier, le réseau obtenait l’arrêt du chantier au grand dam des responsables du site qui annonçaient un arrêt du chantier pour deux ans. et qui, avec une certaine démagogie, accusaient le "réseau" de s’attaquer au travail des ouvriers présents sur le site. Propos relayés par certains syndicats.

Ne se laissant pas intimider les militants du Réseau "Sortir du nucléaire", représentés par son administratrice Chantal Cuisnier, se présentaient devant la centrale de Brennilis avec un huissier afin de signifier à EDF l’obligation d’arrêter les travaux.

Par cette démarche, le Réseau "Sortir du nucléaire" entendait empêcher EDF de bâcler cette opération au détriment de l’environnement, de la santé des salariés et en bafouant la légalité.

Le réseau notait par ailleurs que, en plus des risques imposés aux travailleurs et du problème insoluble du stockage des déchets, le démantèlement de ces réacteurs constitue une incroyable bombe à retardement sur le plan financier : EDF annonce avoir budgétisé à cet effet quelques dizaines de milliards d’euros, alors que la facture finale se comptera certainement en centaines de milliards. A titre de comparaison, la Grande-Bretagne a évalué à 103 milliards d’euros le démantèlement de ses installations, beaucoup moins nombreuses qu’en France.

Les dirigeants de la centrale devaient se conformer à la décision du Conseil d’Etat. Quelques travaux de sécurisation en cours étaient achevés avant la fin du mois de juin et les opérations de démantèlement étaient bel et bien stoppées.

Dans un communiqué le réseau affirmait que "Ce succès du mouvement antinucléaire pourrait avoir des conséquences insoupçonnées. En effet, qu’il s’agisse du dossier du démantèlement des installations nucléaires ou de celui de la construction de nouveaux réacteurs, l’industrie nucléaire n’est peut-être qu’un colosse aux pieds d’argile."

Ils ne pouvaient savoir alors que l’avenir proche allait confirmer leur pronostic au delà de tout ce qui était imaginable !

Un rapport d’inspection accablant de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN)

Un article paru dans le journal Ouest-France est parfaitement éclairant sur le nouveau scandale mis à jour par le Réseau "Sortir du Nucléaire".


Ouest-France - jeudi 12 juillet 2007 - Yannick Guérin

Brennilis : EDF se fait taper sur les doigts
Fûts de déchets radioactifs corrodés, radioactivité fortement sous-évaluée, erreurs de comptage, accuse un rapport du « gendarme » du nucléaire.

BREST. - Début juin, les militants du « Réseau sortir du nucléaire » ont obtenu de la justice l’arrêt du démantèlement de la centrale de Brennilis (Finistère). Voilà qu’ils viennent de dénicher un document plutôt embarrassant pour EDF. Il s’agit de la synthèse des constatations effectuées par des inspecteurs de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), à Brennilis, le 31 mai dernier. Rapport daté du 20 juin et mis en ligne, mardi, sur le site de l’ASN.

Qu’ont vu les inspecteurs ? Des fûts, contenant des déchets radioactifs produits en 2004 et 2005, « présentent des signes de corrosion externe assez prononcée ». La comptabilité du nombre de colis, des tonnages de déchets entreposés ou évacués, semblait très approximative. L’ASN est même très sévère sur ce point. Elle note une « incohérence totale » des données chiffrées.

Plus inquiétant encore. Concernant l’activité radiologique de certains déchets tritiés (qui contiennent du tritium, considéré comme hautement toxique), l’ASN constate « une forte sous-évaluation, d’un facteur de 30 à 200 ».

Des documents accompagnant une expédition de déchets nucléaires « ne correspondaient pas au colis envoyé ». Cette « non-conformité » et cet « écart » - « deux fautes », dénoncent les antinucléaires - n’ont pas été déclarés à l’ASN... EDF, de son côté, estime que la recommandation de l’Autorité « ne concerne pas des écarts méritant une correction immédiate ».

« Barré par du ruban adhésif ». Pourtant, l’ASN a aussi noté que des déchets nucléaires présentant des risques chimiques et d’incendie ont été mis dans une zone « trop proche » de déchets tritiés. Cette zone ne pouvait, en cas d’incendie, être arrosée par un brumisateur automatique. Et un autre brumisateur était hors service. Un local destiné à l’entreposage des déchets radioactifs amiantés était bien fermé à clé. Mais il est « directement accessible par le local adjacent dont les parois ont été déposées et dont seule l’issue externe est barrée par trois bandes de ruban adhésif ».

EDF a deux mois pour répondre à l’ASN, en prenant des engagements et en fixant un calendrier. « Sortir du nucléaire » estime que l’entreprise « tente d’abuser l’opinion en lui laissant croire que le démantèlement d’un réacteur nucléaire ne pose pas de problèmes ». EDF assure que « des actions de progrès vont bien sûr être rapidement mises en oeuvre, sous le contrôle vigilant de l’ASN ». Nous voilà rassurés...


C’était pourtant un chantier qui avait la prétention d’être modèle, une "carte de visite française pour les marchés à l’étranger".

"Brennilis devait permettre à la France de prendre de l’avance sur la concurrence mondiale". avait dit le responsable du site en 1995, lors de la première étape du démantèlement.

"On ne laissera pour autant pas faire n’importe quoi" avait tempéré le préfet du Finistère de l’époque , "EDF, le CEA, les grandes entreprises et l’ensemble des intervenants ont déclaré leur intention de faire de cette opération une vitrine. Il faudra y veiller ".

Mais ce préfet, M. Christian Frémont, muté dans un autre département, n’était bientôt plus là pour "veiller".

Aujourd’hui qu’il est directeur du cabinet du ministre de l’écologie, Jean-Louis Borloo, il ne peut pas se désintéresser de cet accablant dossier.

 


Pour retrouver les textes officiels :

décret autorisant Electricité de France à procéder aux opérations de mise à l’arrêt définitif et de démantèlement complet de l’installation nucléaire de base EL 4-D des monts d’Arrée.

arrêté du conseil d’état

rapport d’inspection de l’ASN


22 septembre 2007
Brennilis. « Des taux supérieurs à la normale » (Télégramme)

 

L’association Sortir du nucléaire Cornouaille a commandé à la Criirad (*) une étude sur l’impact radiologique de la centrale de Brennilis

.

Aujourd’hui connus, les résultats de ces recherches seront communiqués cet après-midi à La Feuillée.

« Nous avons constaté une contamination anormale des plantes et des sédiments prélevés dans le chenal de rejet des effluents de la centrale, chenal qui se jette dans la rivière l’Ellez. Nous avons trouvé des éléments artificiels qui viennent forcément d’une activité nucléaire », affirme Bruno Chareyron, ingénieur en physique nucléaire et responsable du laboratoire de la Criirad. Et le scientifique de citer en exemple le Césium 137 ou l’Actinium 227, bref des « intrus » qui ne rentrent pas vraiment dans la composition des yaourts, même allégés.

Rejets sans autorisation

En quelle quantité ? « Dans des taux très nettement supérieurs à la normale - 3.000 becquerels par kilo pour le Césium 137 là où la norme se situe entre 0 et 50 becquerels - et dans un milieu qui n’est pas apte à les recevoir en raison d’une très faible dilution », répond Bruno Chareyron. Pourtant, selon lui, la centrale n’a pas d’autorisation pour émettre des rejets radioactifs, ni dans l’eau, ni dans l’air. « Nous avons néanmoins mesuré dans l’atmosphère des taux de Tritium (hydrogène radioactif) 30 fois supérieur à ceux constatés à la centrale de Saint-Alban (Isère) qui est beaucoup plus grande », soutient le physicien.

« Série d’anomalies »

Ce dernier pointe aussi du doigt « un système de contrôle et de surveillance d’EDF totalement aberrant, incapable de vérifier l’impact des rejets. Imaginez, leurs analyses des pluies n’ont même pas "vu" la catastrophe de Tchernobyl en 1986. C’est dire ! La fiabilité de leur inventaire est douteuse : certains éléments radioactifs présents dans nos prélèvements comme l’argent 108 m ne s’y trouvent pas ! ». « Il y a là une série d’anomalies. Il est temps que la population se réveille pour être exigeant envers EDF et l’État qui avait autorisé un décret illégal permettant le démantèlement total : aucune enquête publique n’avait en effet été réalisée contrairement à ce qu’ordonne la loi », estime le chercheur.

Obtenir la transparence

Aujourd’hui, la Criirad et Sortir du nucléaire réclament, avant toute reprise du démantèlement, la transparence totale sur les pratiques d’EDF à Brennilis. Les associations veulent que le site soit décontaminé et que l’exploitant s’explique sur l’origine de cette contamination. Elles souhaitent, enfin, connaître le taux de radioactivité actuel et appellent de leurs vœux une enquête publique ainsi qu’une étude d’impact scientifique et épidémiologique sérieuse.
« Le démantèlement total n’est pas une entreprise anodine. Car, la radioactivité au cœur du réacteur est encore aujourd’hui de l’ordre de 100 Sievert/heure. Ce n’est pas rien, lorsque l’on sait qu’une simple dose de 6 Sievert/heure est mortelle... », conclut Bruno Chareyron. * Criirad : Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité (association loi 1901). Internet : www.criirad.org

Hervé Corre


10 Octobre 2007. Que deviendra le coeur de la centrale

Ouest-France du 10 octobre 2007

Le réacteur de Brennilis sera stocké dans l’Ain

Interview. Charles Plourdeau, porte-parole d’EDF et Bertrand Dubuis, directeur de la centrale nucléaire depuis trois ans, font le point sur le démantèlement.
La centrale nucléaire finistérienne de Brennilis a fonctionné pendant 18 ans. Son réacteur a été arrêté en 1985. Engagé en 1997, le démantèlement est aujourd’hui suspendu par le Conseil d’État pour insuffisance d’information du public.

Quelles suites au démantèlement ? Sortir du Nucléaire dénonce un « budget pharaonique » et un « manque de transparence »...

Au début, on s’est conformé à la législation française de l’époque. Depuis, la réglementation a énormément évolué. La loi Transparence et Sûreté en matière nucléaire n’existe que depuis 2006. Nous attendons le nouveau décret signé par le gouvernement. On a quand même montré que l’on savait complètement démanteler un bâtiment nucléaire. Un savoir-faire que EDF espère exporter. Question budget, on est dans les clous. Idem pour le planning, à mi-parcours. Nous ne divulguerons pas le coût total, pour des raisons de concurrence. EDF a provisionné 29,2 milliards d’euros au titre de la déconstruction globale.

D’où viennent le plutonium et l’américium 124, éléments radioactifs dangereux détectés autour du site, par la Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité (Criirad) ?

C’est inexpliqué. La déconstruction ne génère pas de radioactivité. Alors, radioactivité naturelle ou conséquences de l’activité ancienne de la centrale ? Les études du Commissariat à l’énergie atomique sur cette « atypie » seront soumis, en novembre, à l’observatoire du démantèlement. Rappelons que le laboratoire du site de Brennilis a quand même effectué 850 prélèvements par an, sur l’herbe, la pluie, le lait... En mai, une inspection, effectuée par l’Autorité de sûreté nucléaire, pointait certains dysfonctionnements, comme une sous-évaluation de l’activité radiologique de certains déchets et la corrosion des fûts où ils sont entreposés. Depuis, nous avons démontré que cette corrosion n’impliquait pas de fuites.

Existe-t-il une solution pour les déchets les plus radioactifs ? Une fois déconstruit, où partira le bâtiment réacteur, forcément irradié ?

Enlevé en 1985, le combustible est entreposé à Cadarache (Bouches-du-Rhône) dans une installation provisoire. Il faut lui trouver une destinée « ultime ». Nous avons aussi prévu de construire une installation intermédiaire à Bugey (Ain), pour stocker Brennilis, qui nous servira ensuite pour les quatre autres réacteurs dont on a aujourd’hui entamé le démantèlement. Ce site d’entreposage est annoncé pour 2015.

Recueilli par Frédérique GUIZIOU.


Le Télégramme 10 octobre 2007

Brennilis. Au cœur du réacteur

Suspendu par décision du conseil d’État depuis le mois de juin dernier, le chantier de déconstruction de la centrale de Brennilis continue d’alimenter les conversations. La direction d’EDF a accepté de nous ouvrir les portes de l’enceinte du réacteur.
Il ne reste plus grand-chose, à vrai dire. Le chantier de démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis a débuté depuis déjà dix ans. Une pelouse bien verte a remplacé la majorité des anciens bâtiments. Reste à démanteler un sous-sol de bassin d’effluents et surtout, l’immense dôme grisâtre abritant encore le réacteur.

« Nous espérons reprendre le chantier mi-2009 »

Mais voilà, depuis le 6 juin dernier, EDF, maître d’œuvre de ce gigantesque chantier de déconstruction, a été sommé par le conseil d’État de suspendre les travaux. Une histoire d’étude d’impact non publiée dans les délais impartis. « Nous préparons actuellement un nouveau dossier. Nous le déposerons au mois de juin prochain en espérant pouvoir reprendre le chantier mi-2009 et réaliser le démantèlement total à l’horizon 2020 », explique Bertrand Dubuis, responsable du site. En attendant... Eh bien, en attendant, rien. Sur les 100 employés qui travaillaient sur le chantier, « 25 seront conservés pour assurer les travaux de maintenance, de gardiennage et d’entretien de la centrale ».

« Les travaux ont cessé »

Sur place, cette baisse d’activité se vérifie. Dans le bâtiment du réacteur, seuls quelques individus en blouse blanche s’affairent. « Ils installent le nouveau matériel de détection », explique Bertrand Dubuis. Au sous-sol, une jeune femme contrôle des barils jaunes. « Ce sont des fûts de déchets faiblement radioactifs. Il nous en reste 300 à expédier dans l’Aube, sur le site de l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) », souligne le directeur. Dernier envoi avant longtemps. Car dans les autres salles de l’immense bâtiment, celles du réacteur et des échangeurs thermiques notamment, les travaux ont complètement cessé depuis la fin juillet. Soit deux mois après la suspension de chantier ordonnée par le conseil d’État.

Un monstre encore vivant

« Pendant cette période, nous avons dû finir les travaux de démantèlement de l’enceinte du réacteur et replier le chantier afin de ne pas laisser de tuyaux éventrés derrière nous », indique Bertrand Dubuis en franchissant le premier des trois portails de sécurité qui relient le réacteur à l’extérieur. Car même si le monstre de béton de Brennilis a perdu 99 % de sa radioactivité depuis la cessation de la production en 1985, il reste ce petit 1 % de danger mortel qui explique tout : les dix ans de travaux restants, la rigueur des procédures de sécurité et la vigilance des associations environnementales...

Vincent Lastennet

« Il est urgent d’attendre »

Chantal Cuisinier, représentante de l’association « Sortir du Nucléaire », espère pouvoir « lancer un débat public sur le démantèlement de la centrale ». Elle souhaite que « des experts indépendants procèdent à un bilan radio écologique fiable et approfondi sur la population et sur l’environnement depuis 1967, avant toute reprise de la déconstruction ». Un travail de longue haleine. Qu’importe : « Il est urgent d’attendre », conclut-elle, impatiente de découvrir le résultat de l’étude réalisée à Brennilis par la commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité (Criirad) qui sera rendue publique la semaine prochaine.


Le Rapport de la Criirad

Bruno Chareyron, ingénieur en physique nucléaire et responsable du laboratoire de la CRIIRAD a fait part du résultat de ces analyses notamment sur des prélèvements de sédiments, sols et mousses prélèvés à proximité de la centrale nucléaire de Brennilis en 2006, lors d’une Conférence publique le samedi 22 septembre 2007 à 17 heures La Feuillée Salle polyvalente.

Extrait du rapport complet

3 / Résultats des analyses des plantes aquatiques par spectrométrie
gamma

Le résultat détaillé de l’analyse par spectrométrie gamma N°22197 du 29 mars 2006 est
reproduit page ci-contre.

3.1 Radionucléides émetteurs gamma artificiels
Deux radionucléides artificiels émetteurs gamma présentent une activité très supérieure aux
limites de détection. Il s’agit :

· du césium 137, produit de fission, émetteur bêta-gamma de période physique égale à
30 ans. Son activité est de 504 Bq/kg sec.

· du cobalt 60, produit d’activation émetteur bêta-gamma de période physique égale à
5,27 ans. Son activité est de 294 Bq/kg sec.

Ces activités témoignent d’une contamination incontestable.

A écouter sur France-info

Brennilis dans le Finistère. Le premier démantèlement d’une centrale nucléaire française envoyée "à la casse". EDF comptait bien s’en servir de modèle pour exporter son savoir-faire à l’étranger. Mais des analyses relèvent une contamination anormale de l’environnement…


Démantèlement de la centrale nucléaire des Monts d’Arrée (dite de Brennilis) : les associations interpellent les autorités

Des associations locales - Vivre dans les Monts d’Arrée, AE2D et SDN Cornouaille - et nationales - le Réseau "Sortir du nucléaire" et la CRIIRAD - interpellent ce jour le Premier ministre et les ministres de la Santé et de l’Ecologie sur les dysfonctionnements majeurs qui entourent le démantèlement de la centrale nucléaire des Monts d’Arrée (dite de Brennilis), dans le Finistère.

L’option du démantèlement total et immédiat a été retenue alors que les études de l’exploitant indiquent :

1/ qu’elle est plus dangereuse pour les intervenants ;

2/ qu’elle coûte plus cher ;

3/ qu’elle produit plus de déchets radioactifs ;

4/ qu’il n’y a pas de solution de stockage pour les déchets les plus actifs.

Toujours selon des documents officiels, le motif déterminant serait l’impact favorable d’une libération rapide du site sur la perception par le public de la filière électronucléaire (sic !)
Les associations demandent l’organisation d’une réunion de travail et des garanties, tant sur le plan de la participation effective du public au processus de décision que sur le plan de la protection sanitaire et environnementale.

Il s’agit notamment d’obtenir :

- l’organisation d’un débat public en préalable au lancement de l’enquête publique, conformément aux termes de la convention Aarhus et compte tenu de l’enjeu du dossier, tant au niveau local que national.

- la réalisation de contre-expertises indépendantes, en particulier en ce qui concerne 1/ le choix du type de démantèlement, immédiat ou différé ; 2/ l’état des sols et des structures déclarées « assainies » ; 3/ le niveau de contamination résiduelle des déchets dits conventionnels.

- des garanties sur la fiabilité et l’exhaustivité du dossier qui sera soumis à l’enquête publique, en particulier en ce qui concerne l’évaluation du terme source, l’état radiologique de l’environnement et l’impact dosimétrique des rejets, tant sur la population que sur les travailleurs.

- la décontamination complète de l’environnement, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du site.

- la publication des seuils en dessous desquels les déchets contaminés sont considérés comme non radioactifs et peuvent être recyclés : l’enjeu concerne plus de 30 000 tonnes de béton et de ferrailles.

- la fixation de limites pour les rejets de polluants dans l’environnement tout au long des travaux de démantèlement (pour l’instant l’Etat donne carte blanche à l’exploitant).

L’enjeu de ce dossier est considérable. En effet, le démantèlement de la centrale nucléaire des Monts d’Arrée doit servir de modèle au niveau national. A ce jour, 39 réacteurs nucléaires ont été arrêtés et ce n’est que le début car la moyenne d’âge des réacteurs en fonctionnement est élevée.

Lire EN PIECES JOINTES :

- la lettre adressée à M. Jean-Louis Borloo ministre de l’Ecologie, du développement et de l’aménagement durable.

Word - 175.5 ko

- le texte explicatif de 4 pages.

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Brennilis. EDF reconnaît la pollution

 

Le plutonium détecté dans le chenal de rejet des eaux du site de Brennilis provient de l’activité passée de la centrale nucléaire. EDF l’a avoué hier pour la première fois en public. En revanche, l’actinium 227, élément radioactif découvert dans la région, serait d’origine naturelle. Deux laboratoires indépendants l’affirment. Ce qui n’exclut pas certains dangers.

Maison du lac, sur le site de Brennilis. Une quarantaine d’élus locaux, de représentants de l’État et d’associations antinucléaires sont réunis pour la deuxième session annuelle de l’Observatoire du démantèlement de la centrale nucléaire. « Il n’y a jamais eu autant de participants », souligne Charles Plourdeau, responsable communication d’EDF. C’est vrai que l’ordre du jour est alléchant. EDF doit s’expliquer sur la présence de plutonium dans le chenal de rejet des eaux de la centrale et deux laboratoires indépendants rendent leur conclusion sur l’actinium 227 retrouvé en forte concentration dans la région.

 

Du plutonium dans le chenal

 

Pour le premier élément radioactif, le plutonium, Bertrand Dubuis, responsable du site, joue carte sur table. Oui, cette pollution provient de l’activité passée de la centrale. Les antinucléaires apprécient l’aveu mais restent sur leur faim. « Il n’a dit que deux phrases à ce sujet, comme si c’était un détail », commente Alain-François Calderon d’Eau et Rivières de Bretagne.

 

Naturellement dangereux

 

Quid de l’actinium 227 ? Ce « petit-fils de l’uranium 235 » prolifère dans la région de Brennilis. Un rapport avec la centrale ? « J’en étais convaincu. Mais nous avons découvert que l’actinium 227 provenait des sources granitiques. Le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) est arrivé aux mêmes conclusions », explique le biologiste Pierre Barbey, consultant scientifique de l’association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro). Naturel ne veut pas dire inoffensif. « L’actinium 227 est un élément fortement radiotoxique. L’eau devra être surveillée de près dans les monts d’Arrée ».

 

Plus proche des gens

 

Cette réunion de l’Observatoire a également permis d’évoquer la création d’une Commission locale d’information (CLI). « Cette structure devrait remplacer l’Observatoire d’ici un an », annonce Bertrand Dubuis. Les associations se réjouissent. « Cela nous permettra d’obtenir des moyens. Pour financer des expertises par exemple. Cette commission sera plus proche des attentes de la population, car dirigée par le président du conseil général et non plus par le sous-préfet », explique Chantal Cuisnier, de Sortir du nucléaire Cornouaille.

 

Pas d’expert, pas de visite

 

Seul incident de la journée : les associations ont refusé, hier, de participer à la visite du réacteur organisée par EDF. « Nous avions demandé à être accompagnés d’un expert indépendant. Cela nous a été refusé », s’indigne Chantal Cuisnier. Réponse de la sous-préfète de Morlaix : « La requête de l’association était dénuée de tout fondement ». Et la transparence dans tout ça ? « Les rapports des deux laboratoires sur l’actinium 227 et sur le plutonium sont publics. Les associations pourront commander une contre-expertise après avoir pris connaissance des études réalisées ». Le 28 juin 2006, le législateur a prévu la création d’un site d’enfouissement profond. Celui-ci ne sera réalisé qu’en 2025. La fin du démantèlement de la centrale de Brennilis étant programmée en 2020, EDF a décidé d’ouvrir un site de gestion provisoire. Il se situera à Bugey, dans l’Ain, et devrait être achevé en 2012.

Vincent Lastennet, Le Télégramme. 29 Novembre 2007.


 

 

Un film de Brigitte Chevet - 52 mn / 2008

Juin 2007 : deux groupes opposés se font face, et s’invectivent devant la centrale nucléaire de Brennilis, au centre du Finistère. Écologistes d’un côté, employés d’EDF de l’autre. Les noms d’oiseaux volent. Les uns viennent d’obtenir l’arrêt des travaux de déconstruction du réacteur, les autres protestent au nom de l’emploi. La presse mitraille cette scène, pleine de tension électrique. Pourtant, cette petite centrale était censée être la « vitrine du démantèlement du futur », un exemple pour tous les sites nucléaires français en bout de course ! Comment en est-on arrivé là ?

Plantée en plein milieu des Monts d’Arrée, au lieu-dit des « Portes de l’Enfer » où est censé habiter l’Ankou, cette centrale a symbolisé l’entrée de la Bretagne profonde en modernité. Une aventure de Spirou et Fantasio, mettant en scène le valet de la mort des légendes bretonnes, s’y déroule (L’Ankou, collection Spirou et Fantasio, 1977, chez Dupuis).

Depuis plus de vingt ans, elle a cessé de fournir ses kilowatts. C’est la première centrale française arrivée en fin de vie active. Seul son coeur, encore radioactif, bat toujours, obligeant les démanteleurs à beaucoup de patience et de minutie. Étrange château endormi, qui dénote dans le paysage.

Avec la complicité de Fournier, le dessinateur de L’Ankou, qui nous prêtera ses planches pour ce documentaire, en collectant témoignages et archives, nous raconterons l’histoire de ce drôle d’endroit. De ses débuts à son abandon, des enjeux du démantèlement en passant par les bombes du FLB des années 70, du « retour à l’herbe » proclamé jusqu’aux questionnements actuels des écologistes, qui tirent le signal d’alarme sur d’éventuelles contaminations dues à la centrale. De l’Ankou ou de l’Atome, qui est en train de gagner la partie à Brennilis ?

Montage / Editing : Katia Manceau Images / Photography : Didier Gohel / Brigitte Chevet / Christophe Cocherie / Ludovic Auger Son / sound : Frédéric Hamelin / Patrice Hennetier / Jean-François Briand / Henri Puizillout / Eric Bouillon Lumière / lights : Josselin Raoult Infographie : Christine Mousset Une coproduction Vivement Lundi ! / France 3 Ouest avec le soutien de la Région Bretagne, du CNC, de la Procirep, de l’Angoa/Agicoa et de France 3 "La Case de l’Oncle Doc".


 

Foule et indignation après le film sur Brennilis

 

Ouest-France 10.10.08

Le documentaire de Brigitte Chevet sur « la centrale qui ne voulait pas s’éteindre » soulève questions et indignation à Pont-de-Buis.

« Brennilis, la centrale qui ne voulait pas s’éteindre », le film de la réalisatrice Brigitte Chevet, a été projeté, vendredi soir, à la médiathèque de Pont-de-Buis dans le cadre du mois du Documentaire. Il a secoué le nombreux public de cette soirée très instructive. Le long-métrage, excellent et passionnant, met deux acteurs face à face, sans prendre partie : EDF, l’exploitant et démanteleur de la centrale, et le collectif Sortir du nucléaire.

Il pointe aussi du doigt de gros points noirs, comme la pollution et la sécurité du personnel. Posant au final cette question stupéfiante : qui de l’Ankou ou de l’Atome va gagner la partie à Brennilis ? L’épineux sujet a été évoqué en présence de la réalisatrice et d’un témoin privilégié en la personne de Michel Marzin, ancien adjoint du directeur du site.

Son témoignage, direct et sincère, évoque le solide mensonge qui a entouré cette immersion dans l’univers du nucléaire. « À l’époque, avoue-t-il avec émotion, nous étions fiers d’avoir participé à cette construction de la centrale. Avec le recul, je témoigne mais je ne pourrais pas revenir en arrière. Les moyens de sécurité n’ont pas été à la hauteur, le risque sous évalué... Depuis 1982, 50 % des gens ayant travaillé au contact de l’eau lourde sont décédés à moins de 65 ans. C’est terrible, mais pas reconnu. Les employés contaminés des centrales étaient de la viande à neutron. »

Au long du débat, terrible mais lucide, plane le danger, opaque et invisible, de l’atome. Tout comme « l’énorme mensonge » et la « loi du silence ». Sans oublier les fuites, radioactives ou financières.

 

Un débat qui en appelle d’autres...

 

Au fil de cette soirée très animée, de nombreuses interventions ont concerné les dangers encore trop méconnus de l’énergie nucléaire, l’incapacité à maîtriser les rejets et le déficit cruel d’informations, notamment de la part des autorités exploitantes.

Brigitte Chevet, réalisatrice du film, reconnaît cependant avoir obtenu facilement l’autorisation de tourner et ne pas avoir subi de pression a posteriori. Michel Marzin, ancien directeur adjoint pense qu’il est plus sage d’attendre un siècle avant de déconstruire le réacteur, le cobalt, noyau de Brennilis, mettant trente ans à se désactiver de moitié.

« Par ailleurs, martèle-t-il, l’enquête publique, suite à l’arrêt de la déconstruction après de nombreuses négligences, sera un bon tremplin pour demander des vérités. Comme sur la pollution du lac au tritium, lors des rejets d’eau de refroidissement, qui ont contaminé les brochets. De plus, tout le bassin versant est touché, ainsi que des nappes phréatiques. C’est terrible, poursuit-il, mais j’ai vu une femme tripoter ces algues à mains nues, lors de prélèvements. Voire même mon responsable prendre des charges par imprudence. ».

Cet autre témoin, ancien militaire présent à Mururoa, témoigne : « C’est épouvantable, nous n’étions pas protégés, ni informés. Nous allions en short ramasser les déchets. Une dose, même très infime, ingérée suffit à condamner l’homme. Effrayant ! »

Le rapport de force, la confiance en la recherche qu’il faut financer, les énergies plus propres, l’omerta sur les mesures effectuées et le financement des laboratoires ont également été évoqués lors du débat qui en appelle d’autres.

Prochaines séances. Elliant, vendredi 14 novembre à la salle polyvalente (02 98 95 88 12) ; Moëlan-sur-Mer, mardi 18 novembre, Le Kerfany, tarif : 4 € (02 98 39 65 88) ; Châteaulin, jeudi 20 novembre, au Run ar Puns (gratuit).


Lire aussi :

 

 


Une CLIE (Commission Locale d’Information et d’Echange) pour quoi faire ?

Il a fallu beaucoup de temps pour mettre en place une CLIE à Brennilis.

Mais voilà : elle n’a pas encore eu le temps de s’installer et l’enquête publique pour la phase 3 de commencer que déjà l’"entreprise privée chargé du démantèlement a été choisie.

 

Mauvais départ !

 


 

Brennilis (29). Les antinucléaires persistent et signent

 

Le Télégramme du 28.11.09.

À la pauvre dizaine d’observations seulement enregistrées jusqu’alors se sont subitement ajoutées plus d’un millier de signatures à l’enquête publique sur le démantèlement de la centrale de Brennilis, hier après-midi, à Loqueffret (29). Et encore l’addition aurait-elle pu se révéler plus lourde si le règlement comptabilisait les manifestations électroniques (1), au nombre de 5.900.

 

Nouvelle demande de débat national

À qui doit-on ces milliers de paraphes ? À une pétition organisée par plusieurs associations antinucléaires (2) : « Nous demandons à la commission d’enquête de ne pas autoriser le redémarrage du chantier de Brennilis tant qu’un débat national sur la question plus générale du démantèlement des centrales nucléaires n’aura été organisé », explique Chantal Cuisnier, de Sortir du nucléaire.

Un souhait exprimé à de multiples reprises depuis juin 2007, au lendemain de l’arrêt du dernier chantier de démantèlement. Mais à quoi bon solliciter la Nation quand une enquête publique attise déjà peu de passion localement ? « Dans une enquête publique, les gens peuvent avoir le sentiment que le scénario est déjà ficelé. Cela ne sert à rien de se déplacer. En revanche, une réunion publique offre des moyens d’accès au débat. Et celui-ci doit concerner beaucoup de monde, ne serait-ce qu’à travers la problématique du transport des déchets ».

Quinze jours de rab

Selon les antinucléaires, le débat public aurait également l’avantage de mieux cerner la question du calendrier de démantèlement. « Sachant que dans 50 ans, la radioactivité du site aura été divisée par 1.000 ». Du temps, Danielle Faysse, directrice de la commission de l’enquête publique, consent à en accorder. 15 jours de rab de procédure en espérant enrichir le registre de remarques supplémentaires. S’articulant justement autour du thème « Démanteler tout de suite ou après », la réunion publique de jeudi soir, à Loqueffret, servira-t-elle de catalyseur ?

1. Contrairement à ce que nous indiquions dans une précédente édition, les dépositions par courriel n’ont pas de valeur juridique.

2. Bretagne vivante, AE2D, Eau et Rivières, Sortir du nucléaire Cornouaille, Groupement mammologique breton, Vivre dans les monts d’Arrée et CLCV.



 

 

 

La centrale nucléaire finistérienne est la première qu’EDF démolit. Depuis trois ans, le chantier est stoppé, à la suite du recours en justice d’associations de protection de l’environnement. Le démantèlement du réacteur pourrait intervenir en 2010, après une nouvelle enquête publique.

Ouest-France, mardi 29 décembre 2009


 

Centrale de Brennilis (29). Avis défavorable pour le démantèlement

 

lundi 29 mars 2010

La commission d’enquête publique sur le démantèlement de l’ancienne centrale nucléaire de Brennilis (29) a émis "à l’unanimité" un avis défavorable au projet présenté par EDF, selon les conclusions des commissaires enquêteurs consultables sur le site de la préfecture du Finistère.

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Tchernobyl day 2010 à Brennilis.

 

Nous étions un peu plus de 200 ce dimanche 25 avril à Brennilis. Ambiance amicale et festive qui n’a pas fait oublier le drame vécu par les habitants de la région de Tchernobyl.

 

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On ne savait pas où mettre les déchets radioactifs de Brennilis ? Maintenant on sait !

 

 

 

Un décret paru dimanche au Journal officiel, autorise EDF à créer, dans l’Ain, sur le site de la centrale nucléaire du Bugey, une « installation de conditionnement et d’entreposage de déchats activés ».

Cette installation nucléaire de base pourra accueillir des « déchets de moyenne activité à vie longue » provenant du programme EDF de démantèlement des centrales nucléaires de première génération, actuellement à l’arrêt, dont celle de Brennilis, dans le Finistère.

Ce type de déchets, ne représente que 0,05% des 965 000 tonnes générées par le démantèlement des centrales, soit environ 482 tonnes de déchets. Neuf réacteurs nucléaires d’EDF, construits pour la plupart dans les années 1950 et 1960, sont concernés.

Les travaux de ce centre de stockage devraient débuter en juin pour une mise en service en 2013. Les déchets seront stockés temporairement au Bugey avant l’ouverture d’un centre de stockage géologique définitif ,prévu par la loi du 28 juin 2006 et actuellement à l’étude dans la Meuse.


 

 

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) va demander la reprise du démantèlement partiel de l’ancienne centrale nucléaire de Brennilis (Finistère), dont le démantèlement complet a été gelé.

« Nous allons soumettre à l’Etat une demande d’autorisation d’achèvement du démantèlement partiel », excluant le réacteur proprement dit, a déclaré Thomas Houdré, chef de division à l’ASN, lors d’une conférence de presse à Rennes.

L’ASN prend ainsi en compte les recommandations de la commission d’enquête publique sur le démantèlement de l’ancienne centrale, qui, en mars, a émis un avis défavorable au démantèlement complet.

Filière opérationnelle en 2013

La commission a estimé que la demande d’EDF en ce sens est insuffisamment motivée et relevé l’absence de filière de retraitement pour « un certain nombre de déchets produits lors du démantèlement du coeur du réacteur ».

Une telle filière pourrait être opérationnelle en 2013 selon l’ASN, qui a encouragé EDF à engager une nouvelle procédure de démantèlement complet.

Doyenne des centrales françaises (mise en service en 1967, arrêtée en 1985), Brennilis doit servir de test pour les futures autres déconstructions.

Ouest-France.


44 ans d’illégalité en toute impunité

Le 22 novembre 2011

Communiqué du 22 novembre 2011 des 7 associations (AE2D, BV, CLCV, ERB, GMB, SDNC, VMA*)

Centrale nucléaire de Brennilis : 44 ans d’illégalité en toute impunité

Discrètement pendant les vacances de la Toussaint , un arrêté est paru au Journal Officiel autorisant la centrale nucléaire de Brennilis à des rejets radioactifs dans l’environnement, mettant fin à 44 années d’illégalité depuis sa mise en service en 1967.

La centrale de Brennilis a réussi ce tour de force de l’impunité : rejeter sans autorisation légale pendant tout ce temps-là. C’est ce que Bruno Chareyron, ingénieur du laboratoire de la CRIIRAD avait pointé lors de sa conférence en septembre 2007 à La Feuillée**, obligeant EDF à reconnaître la contamination radioactive du chenal du aux rejets de la centrale.

Et ces rejets de cette centrale à eau lourde en fonctionnement ont été gigantesques , plus que ceux de l’usine d’extraction de plutonium (dit « de retraitement ») de La Hague, pourtant eux-même plus élevés que l’ensemble des rejets des centrales en fonctionnement.

Rejets tellement hors normes que le professeur Pellerin** (celui qui pourtant avait nié l’impact sanitaire du nuage de Tchernobyl) avouait en août 1987 au journal Libération avoir pesé de tout son poids pour la faire fermer.

La population est en droit de s’interroger
quel a pu être l’impact sanitaire de tels rejets cancérigènes et mutagènes

. Si le médecin de Brennilis mariée à un employé de la centrale affirme n’ avoir observé aucune augmentation de pathologies, le medecin de Commana (aujourd’hui décédé ) s’interrogeait sur l’inflation de cancers et autres pathologies observées chez ses patients. Michel Marzin, ancien technicien de la centrale, a fait le bilan chez ses collègues : la moitié ayant travaillé sur les circuits tritiés sont décédés avant l’âge de la retraite. Mais comme l’excès de leucémies infantiles observés aux abords des usines de La Hague, Sellafield, comme le bilan de Tchernobyl et maintenant de Fukushima, l’industrie continuera à nier. Jusqu’à quand ?

Cette industrie nous ment quand elle affirme que le nucléaire est sans danger et que la sécurité est assurée. C’est donc à chaque citoyen, conscient qu’il y va de sa vie, d’exiger l’arrêt immédiat du nucléaire civil et militaire.

Contact : Chantal Cuisnier 02 98 53 81 79 / 06 84 14 58 87

*Agir pour un environnement et un développement durables, Bretagne vivante, Consommation logement et cadre de vie, Eau et rivières de Bretagne, Groupement Mammologique Breton, Sortir du nucléaire Cornouaille, Vivre dans les monts d’Arrée


Brennilis : le démantèlement complet repoussé

Ouest-France 3 octobre 2012.

L’annulation par la justice du permis de construire de l’installation dédiée au stockage des déchets hautement radioactifs, près de Lyon, entraîne le report du démantèlement.

C’était le 3 mars dernier, le directeur du site de la centrale nucléaire de Brennilis en était sûr : « Le démantèlement complet aura lieu entre 2020 et 2025. »Mais c’était sans compter sur la détermination d’un agriculteur du Rhône-Alpes : ce calendrier n’est aujourd’hui plus à l’ordre du jour.

Cet été, la justice, saisie par l’exploitant agricole, a prononcé l’annulation du permis de construire d’Iceda, une installation dédiée au stockage des déchets hautement radioactifs au sein de la centrale du Bugey, près de Lyon. Ce site doit accueillir les déchets de Brennilis.

Conséquence : hier soir, à Quimper, la Cli, Commission locale d’information (1) des Monts d’Arrée, a appris que l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ne validera pas le dossier de démantèlement total de Brennilis qu’EDF doit déposer avant la fin de cette année.

Déclassement

La raison ? « À l’heure actuelle, aucun site ne peut accueillir les déchets du coeur nucléaire de Brennilis. Le déclassement définitif du site est de fait repoussé », indique Pierre Maille, le président de la Cli, sans plus de commentaire. « Comme on n’a pas de site, on préfère que les déchets restent pour l’instant en place au lieu de les stocker dans l’enceinte de la centrale », ajoute Eau et Rivières.

En attendant, le démantèlement partiel a tout de même commencé cet été. 1 500 tonnes de terre « faiblement » radioactive, ont été mises en sacs et seront dirigées vers un site de stockage dans l’Aube. En 2013, EDF doit procéder au nettoyage de la station de traitement des effluents. Ce sera toujours ça de fait.

Au total, selon EDF, 100 000 tonnes de déchets doivent quitter Brennilis : 80 % de déchets standards (dits conventionnels) et 20 % de déchets radioactifs. 33 000 tonnes ont été évacuées lors des travaux déjà réalisés, avant 2007. Restent donc 67 000 tonnes, dont un dixième environ radioactifs.

(1) La Cli a été créée le 29 décembre 2008 par arrêté du président du conseil général. La commission assure une mission d’information et de concertation en matière de sûreté nucléaire et d’impact sur les personnes et l’environnement. Elle est composée de parlementaires, d’élus locaux, d’associations, d’organisations syndicales des salariés d’EDF, de représentants du monde économique et de personnes qualifiées. Prochaine réunion, le 17 janvier 2012.
Mickaël DEMEAUX.

Ouest-France


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à écouter :

Là bas si j’y suis à Brennilis. Bienvenue à la centrale.

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