La base de l’Ile-Longue (Finistère), qui abrite les quatre sous-marins lanceurs d’engins, est en alerte. (Photo d’archives Claude Prigent)
Jamais un tel niveau de tension militaire, depuis le début de la dissuasion nucléaire assurée depuis la mer (1972), n’avait été enregistré à la pointe bretonne. Partis de l’Ile-Longue, les marins du ou des sous-marins en patrouille sont en alerte maximale.
Au moins un sous-marin de la force de dissuasion en mer
Un des quatre sous-marins basés à l’Ile-Longue assure en permanence la menace du feu nucléaire. Après l’élection de François Mitterrand, en 1981, en pleine crise des euromissiles (1977-1987), cette permanence avait été portée à trois sous-marins (sur six sous-marins SNLE à l’époque en service). Après une dizaine d’années avec trois sous-marins en permanence à la mer, le format est redescendu à un. Sauf que depuis l’escalade de la guerre en Ukraine, le sous-marin en alerte à l’Ile-Longue (en plus de celui parti en patrouille), capable d’appareiller en moins de 72 heures, a rejoint ce contexte de tension inédit. Afin de ne pas faire reposer la crédibilité de la dissuasion sur un seul navire, du jamais vu en 50 ans de dissuasion !
Plusieurs niveaux d’alerte
Seul le commandant du SNLE parti en patrouille, peut-être depuis plusieurs semaines pour le premier d’entre eux, dispose de quelques éléments sur la situation géopolitique des plus évolutives. Les 110 marins du bord n’ont, eux, aucune information d’actualité ou de contexte. Coupés du monde, ils restent concentrés sur la marche du navire et des systèmes. Ils doivent pouvoir agir sans délais et sans états d’âme, sans connaître les cibles et les sites frappés (même pas le commandant). Plusieurs niveaux d’alerte sont activés à bord. En cas d’alerte maximale, la difficulté du commandant est de graduer la mobilisation de son équipage sans inquiéter outre mesure.
Redoutable puissance de feu
À bord de chaque SNLE, 16 missiles théoriquement équipés de six têtes nucléaires chacun. De nombreuses combinaisons d’armement nucléaire sont à disposition, chaque missile pouvant disperser ses têtes dans un rayon d’action de plusieurs milliers de kilomètres. La portée du M 51 dernière génération embarqué depuis l’Ile-Longue est évalué à 9 000 km. Chaque tête peut délivrer l’équivalent de 10 à 20 fois la bombe larguée sur Hiroshima, au Japon.
Menace longue distance
La portée des derniers missiles de type M 51 permet d’évoluer à grande distance des cibles et d’échapper plus facilement à la traque des navires et aéronefs ennemis. Les SNLE de l’Ile-Longue peuvent évoluer à des milliers de kilomètres de leur cible, dans des dispositions de tir favorables (trajectoire spatiale), en intégrant les capacités de défense anti-missiles en vigueur.
Intense activité militaire
Sur l’eau, dans l’eau et dans les airs, l’activité militaire est intense depuis le démarrage du conflit dans le nord de l’Europe mais également en Atlantique. Chaque nation essayant d’évaluer le nombre, la présence et la zone d’évolution des diverses composantes militaires. Le nombre de SNLE russes serait descendu d’une douzaine à au moins un en patrouille.
Tensions à tous les étages
L’état d’alerte ne concerne pas seulement les sous-mariniers de la force de dissuasion. Surveillance des approches et des diverses zones de navigation, sécurisation des SNLE français pour une « dissolution » sans faille, activation du plus haut degré de surveillance aérienne et des dispositifs anti-missiles.